En vérité, je te le dis,
Je n'ai jamais, jamais menti
Et il
faut, quand je te raconte,
Croire que ce n'est pas un conte.
Lorsque
j'étais enfant
J'élevais gaiement
Des lézards, c'est bizarre,
Des
crapauds, c'est plus rare.
Cependant, vois tu
Ça c'est déjà vu.
Mais
la licorne que j'ai apprivoisée
A-t-elle vraiment existé ?
Je la revois
pourtant fort bien
Venant manger, oui ! Dans mes mains
Et me suivant,
partout, partout
Comme un tout petit chien très doux.
Or, voilà qu'avec
les années,
Je me prendrais presque à douter.
Est-elle comme mes
illusions
Partie, saison après saison ?
Oh ! Surtout pas de
malencontre
Et que personne ne me démontre
Avec des mines
d'éducateur
Que je suis un fabulateur
Et que la licorne que j'ai
apprivoisée
N'aurait pas vraiment existé
Il est sûr qu'elle a disparu.
Où, comment, je ne le sais plus.
Elle
subsiste en souvenir
Aussi menu qu'un soupir.
Mais aussi léger
soit-il
A jamais indélébile.
Et même au jugement dernier,
Je ne
voudrais pas l'oublier.
Ce jour-là s'il me faut
Tout trier du vrai et du
faux
Pour mériter mon Paradis,
Non ! Je ne renierai mon amie.
Je
préférerai la souffrance
Que de parjurer mon enfance,
Et je choisirai la
chaudière.
J'y brûlerai, l'âme à l'envers.
Je suis sûr qu'en restant
fidèle
Je la retrouverai ma belle.
Celle qui quand tout allait
mal,
Me donna son coeur d'animal,
M'a permis, moins malheureux,
De
croire que j'étais heureux.
Et ce n'est pas une raison
Pour dire : c'est
l'imagination !
Je sais et je saurai toujours
Que par la grâce d'un
enfant, l'amour
De la licorne que j'ai apprivoisée
M'a fait rêver la vie
et vivre le rêvé.